Edito
Veille Juridique & Fiscale
Dans le cadre des habilitations qui lui ont été données par la loi de modernisation de l’économie, adoptée cet été, le Gouvernement a entrepris un certain nombre de réformes intéressant tout particulièrement le droit financier et le droit de la concurrence
L’ordonnance du 23 octobre 2008 réformant le cadre de la gestion d'actifs pour compte de tiers est le fruit des réflexions du Haut comité de Place, mis en place il y a plus d’un an par Christine Lagarde pour renforcer l’attractivité de la place financière de Paris.
Cette ordonnance concerne l’ensemble des OPCVM, qu’ils soient constitués sous forme de Fonds (FCP) ou de sociétés (SICAV). Ces structures pourront désormais rédiger leur documentation dans une seule langue, qui pourra ne pas être le francais, sous réserve que cette langue soit compréhensible par les investisseurs auxquels l'information est destinée. Jusqu’à présent, cette dérogation ne bénéficiait qu’à certains Fonds (OPCVM contractuels, FCPR allégés…).
Autre assouplissement : ces structures ne sont plus tenues de désigner un commissaire aux comptes suppléant.
Enfin et surtout, elles sont autorisées à transférer certains de leurs actifs, dont la cession ne serait pas conforme à l'intérêt de leurs investisseurs, à une nouvelle structure de la même forme (SICAV ou FCP). Ce transfert, qui prend la forme d’une scission, est autorisé à chaque fois que des circonstances exceptionnelles l'exigent et dès lors que l'intérêt des investisseurs le commande. La décision appartient à l'AGE des actionnaires de la SICAV ou à la société de gestion du Fonds. Elle n'est pas soumise à l'agrément de l'AMF mais à une simple déclaration. Chaque actionnaire ou porteur reçoit un nombre d'actions ou de parts de la structure créée égal à celui qu'il détenait dans la structure scindée. Ce dispositif de "side pockets " constitue notamment pour les Fonds qui arrivent en fin de vie une solution réclamée par les professionnels pour liquider leur portefeuille. Il devrait éviter aux gestionnaires d’être contraints de brader les actifs peu liquides qui figurent encore à l’actif des Fonds.
L’ordonnance assouplit considérablement le régime des OPCVM contractuels de l’article L.214-35-2 du CMF. Ces derniers sont désormais autorisés, par dérogation au droit des OPCVM, à détenir des " biens " et non plus seulement des instruments financiers, des dépots bancaires et des liquidités. Ils devraient donc pouvoir investir, sous certaines conditions, dans des biens meubles et immeubles (sans que ces biens aient fait l’objet d’une titrisation), voire même détenir certains droits rééls ou intellectuels ….. Espérons que le législateur aura enfin la bonne idée d’étendre cette possibilité aux FCPR contractuels ! Enfin, ces OPCVM contractuels sont juridiquement autorisés, comme des FCPR, à attribuer à la société de gestion une fraction du boni de liquidation. Cela devrait permettre d’émettre des parts fort proches de celles portant le carried interest dans les FCPRsans pour autant bénéficier du cadre de l’instruction fiscale de 2002.
Il convient enfin de signaler les dernières évolutions apportées à la question de la commercialisation des fonds de droit étranger. Souvenez-vous que depuis le 1er novembre 2007, par suite de la transposition de la Directive MIF, les droits représentatifs d'un placement financier dans une entité émis sur le fondement de droits étrangers, tels que les parts de Limited Partnership, sont désormais qualifiés par la loi d’instruments financiers. Pour autant, l’AMF a fait savoir que ces droits n’étaient pas nécessairement librement commercialisables (par voie d’appel public à l’éparne ou de placement privé). Dans un communiqué d’avril dernier, elle indique que les entités dites " ouvertes ", dans lesquelles les porteurs de parts peuvent exiger le rachat des parts par l’entité, ne peuvent être commercialisées qu’après autorisation de l’AMF. En revanche, celles dites " fermées " seraient commercialisables par appel public à l’épargne ou placement privé. L’ordonnance précitée consacre la position de l’AMF au sujet des fonds " ouverts " en indiquant que ces derniers sont des OPCVM, commercialisables en France après avoir fait l'objet d'une autorisation délivrée par l'AMF.
Le Haut Comité de Place a également élaboré d’autres projets de textes qui viennent d’être publiées ou qui devraient l’être sous peu. Ces projets traitent :
- de l’information sur les marchés réglementés (information sur les participations significatives dans les sociétés cotées, sur les déclarations d'intention et sur les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé) ;
- des contrats de liquidité (suppression de l’obligation de mise au nominatif des titres rachetés) et des règles de publicité des rachats d’actions (simplification des règles de publicité) ;
- des instruments financiers (règlement des conflits de loi, indexation des titres de créance et instruments financiers à terme, définition des participants des systèmes de règlements interbancaires ou de règlement et delivraison d'instruments financiers , adjudication des titres de dette publique et titres de créances négociables) ;
- de l’appel public à l’épargne ;
- des actions de préférence. L’ordonnance du 6 novembre 2008 prévoit notamment que les actions de préférence dépourvues de droit de vote au moment de leur émission sont dépourvues de droit préférentiel de souscription.
- le droit de la concurrence
Il convient également de souligner la parution de l’ordonnance du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence. Celle-ci a mis fin, au moins partiellement, au système français qui reposait depuis 1986 sur des compétences partagées entre le ministre chargé de l’économie et le Conseil de la concurrence. Désormais, une Autorité de la concurrence, autorité administrative indépendante, sera en charge du contrôle des concentrations et des pratiques anticoncurrentielles . La procédure y sera mieux encadrée afin de distinguer davantage les phases d’enquête et d’instruction de la procédure de décision.
Enfin, des ordonnances dans le domaine du droit des entreprises en difficulté et du droit de la propriété intellectuelle sont attendues pour le début de l’année 2009.
Actualité Juridique
Adoption de la loi sur les revenus du travail
Cette loi, qui avait été annoncée bien avant l’été par le Président de la République, réforme le régime de l’intéressement (octroi d’un crédit d'impôt pour mise en place d'un accord d'intéressement, etc), de la participation (liberté de choix du salarié entre disponibilité immédiate et blocage des droits liés à la participation, extension aux chefs d' entreprises de moins de 50 salariés et à leurs conjoints s'ils sont collaborateurs ou associés, etc) et des stock-options (dont l’attribution dans les sociétés cotées est conditionnée au fait que la société procède à une attribution d’options ou d’actions gratuites auprès de l’ensemble de ses salariés et d’au moins 90 % de l’ensemble des salariés de ses filiales ou à l’existence d’un accord d’intéressement, de participation dérogatoire ou volontaire au bénéfice d’au moins 90 % de l’ensemble des salariés de ses filiales).
Dans le domaine de l’épargne salariale, on ne peut que regretter que la Commission mixte paritaire ait décidé, in extremis, de retirer son texte qui soumettait certains FCPE à une procédure de déclaration et non d’agrément préalable. Il s’agissait en l’occurrence de FCPE d’actionnariat salarié, investis en titres d’une entreprise non cotée de taille moyenne (moins de 500 salariés).
La loi devrait être publiée dans les jours à venir.
Le 20 novembre, Nicolas Sarkozy a annoncé le lancement d’un fonds souverain à la française destiné à intervenir massivement chaque fois qu'une entreprise stratégique aura besoin de fonds propres. Filiale de la caisse des dépôts (CDC), il sera doté d'un encourt de 20 milliards d'euros en 2009 : 14 milliards proviendront de la réunion des participations minoritaires de l'Etat et de l'ensemble des participations stratégiques de la CDC (à l'exception de CNP Assurances et de Dexia) et les 6 autres milliards seront fournis par l'Etat et la CDC, via l'endettement.
Le fonds ne devrait prendre que des participations minoritaires, d'une durée de deux à dix ans, en vue de conforter des entreprises ne trouvant pas sur le marché l'argent nécessaire à leur développement et de sécuriser le capital d'entreprises stratégiques. Le Fonds sera présidé par l'actuel directeur général de la CDC, Augustin de Romanet.
Faisant suite aux positions prises récemment notamment par la SEC et l’AMF, l’International Private Equity and Venture Capital Valuation Board (IPEV) a jugé nécessaire de réaffirmer son attachement à la fair value qui reste, selon l’organisation, la meilleure mesure pour évaluer les sociétés du portefeuille. Néanmoins, elle rappelle que la fair value ne serait être l’unique critère permettant de mesurer la performance des gestionnaires. Enfin, elle invite l’ensemble des professionnels et tout particulièrement les gestionnaires à la mettre en œuvre avec davantage de rigueur.
Pour plus de détails :
http://www.privateequityvaluation.com/documents/IPEV_Committee_Statement_v3_181108.pdf
Actualité européenne
Fiscalité de l'épargne: la Commission européenne propose des modifications pour mettre fin à l'évasion fiscale
La Commission européenne vient d’adopter une proposition de modification de la directive sur la fiscalité de l'épargne en vue de combler les lacunes existantes et de supprimer l'évasion fiscale. Depuis 2005, en vertu de la directive Épargne, les agents payeurs sont tenus soit de déclarer les intérêts perçus par les contribuables résidant dans d'autres États membres de l'UE soit de prélever une retenue à la source sur les intérêts perçus. La proposition de la Commission vise à améliorer la directive, de manière à mieux garantir l'imposition des paiements d'intérêts transitant par des structures intermédiaires non imposées. Elle prévoit aussi d'étendre le champ d'application de la directive aux revenus équivalents à des intérêts et provenant d'investissements effectués dans divers produits financiers innovants ainsi que dans certains produits d’assurance-vie. En outre, la simplification du fonctionnement technique de la directive devrait faciliter l’utilisation du système et en rendre l’application plus efficace.
Actualité fiscale
Le projet de loi de finances a été adopté le 19 novembre dernier par l’Assemblée Nationale. Il plafonne le montant des avantages fiscaux tirés de certaines niches fiscales à la somme 25 000 € par an, augmentée d’une somme correspondant à 10 % du revenu imposable. Les niches concernées comprennent notamment la réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire au capital des sociétés (plus connue sous le nom de réduction « Madelin ») et de parts de FCPI et FIP. A supposer que la mesure soit entérinée par les Sénateurs, elle s’appliquerait aux investissements ou souscriptions de parts réalisés à compter du 1er janvier 2009. Il convient néanmoins de souligner que cette mesure ne vise que les avantages fiscaux – réductions et créances - accordés au titre de l’impot sur le revenu et non ceux accordés au titre de l’ISF (tels que les investissements dans des PME au travers de holdings ou de Fonds).
A cet égard, signalons que l’amendement restreignant la politique d’investissement des « holdings ISF », adopté en Commission des Finances, n’a finalement pas été retenu. Celui-ci obligeait les « holdings ISF » à investir au moins 60% de leur situation nette dans des sociétés en phase d’amorçage ou de démarrage, de moins de 10 ans et reconnues comme telles par Oséo.
Lors de sa séance du 24 novembre, le Sénat a adopté l’amendement déposé par Jean Arthuis, Président de la Commission des Finances, relatif au régime fiscal des parts et actions de carried interest. Il en résulte que les revenus et gains tirés de ces parts et actions demeurent soumis à l'impôt sur le revenu selon le régime des plus-values (article 150-0 A du CGI) sous réserve que les conditions suivantes soient notamment remplies :
- les parts ou actions doivent avoir été acquises moyennant un prix correspondant à la valeur des parts ou actions,
- ces parts ou actions représentent ensemble au moins 1% du montant total des souscriptions dans le Fonds ou la Société ou un pourcentage inférieur fixé par décret, s'agissant des FCPI et FIP ,
- les sommes ou valeurs auxquelles donnent droit ces parts ou actions sont versées au moins cinq ans après la date de la constitution du fonds ou de l'émission de ces actions et, pour les parts de fonds communs de placement à risques, après le remboursement des apports des autres porteurs de parts.
Les autres conditions, qui figuraient dans l’instruction de mars 2002 (liées au fait que ces actions constituent une seule et même catégorie, que le cédant ne détienne pas d'autres parts ou actions du même fonds ou de la même société de capital-risque pour lesquels il bénéficie des exonérations d'impôt sur le revenu et à la perception d’une rémunération normale au titre du contrat de travail ou du mandat social) sont maintenues.
A défaut de remplir ces conditions, les revenus et gains sont imposés comme complément de salaire.
Il convient de noter que le législateur a élargi le régime fiscal du carried interest aux salariés des entités d’investissement dont l’objet est d’investir dans des sociétés non cotées et qui sont constituées dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale.
Si elles venaient à être confirmées, la plupart des dispositions adoptées s’appliqueraient aux actions et droits émis à compter du 1er janvier 2009. A contrario, les actions et parts émises avant la fin de l’année ne seraient donc que peu impactées …Les parts de carried interest émises à cette date sont également visées mais dans une moindre mesure. L’amendement prévoit que leur prix de revient est désormais diminué des sommes réparties par le Fonds et qui n’ont pas été imposées. Bien évidemment, l’ensemble du dispositif s’appliquera aux FCPR créés à compter du 1er janvier 2009.
… et discute du projet de loi de finances rectificative pour 2008
Présenté à l’issue du conseil des ministres du 19 novembre dernier, le PLFR 08 présente quatre principaux axes :
- le soutien de l’économie et des entreprises, avec un dégrèvement permanent de taxe professionnelle à hauteur de la valeur locative des équipements et biens mobiliers neufs acquis par les entreprises entre le 23 octobre 2008 et le 31 décembre 2009 ;
- l’amélioration de la sécurité juridique et fiscale des contribuables qui passe notamment par une refonte de la procédure d’abus de droit et améliore le rescrit ;
- la lutte contre la fraude fiscale et notamment contre les paradis fiscaux, au travers de l’allongement de la durée de prescription à 6 ans et la majoration du montant des amendes en cas de non déclaration d’un compte bancaire ;
- le développement durable.
Actualité AMF
Lors de cette conférence, l’AMF a rappelé que les sociétés de gestion agréées pour le Capital Investissement devaient, préalablement à la création de FCPR contractuels, mettre à jour leur programme d’activité. Il s’agit pratiquement de présenter les dérogations envisagées et les spécificités des FCPR contractuels par rapport aux autres produits déjà gérés par la SGP. A cet effet, l’AMF a mis au point une trame type, consultable sur le site Internet de l’AMF :
http://www.amf-france.org/documents/statique/fr/formulaires_ppe/Trametype_FCPRContractuel.pdf
Elle a également indiqué que les actifs, qui n’étaient pas expressément éligibles à l’actif des FCPR contractuels, devaient être prochainement définis par l’AMF. La position qui en résultera devrait être communiquée aux professionnels d’ici la fin novembre, via leurs associations. Par ailleurs, le pourcentage de l’actif du FCPR contractuel qui pourra être investi en titres de créances, doit faire l’objet d’un décret qui pourrait fixer un plafond de 15%. Enfin, une réunion est prévue avec les associations professionnelles pour débattre de la possibilité de constituer un FCPR contractuel « Feeder » investi en totalité ou quasi-totalité dans un fonds étranger (Limited Partnership…).
Refonte des instructions FCPR
Les instructions COB du 6 juin 2000 relatives aux FCPR agréés et aux FCPR allégés nécessitaient d’être mises à jour. L’AMF a mis en place à cet effet un groupe de travail composé de professionnels chargé d’élaborer les futures instructions. Celles-ci sont actuellement soumises à consultation. Le principe de deux instructions distinctes, l’une pour les FCPR agréés (dont FCPI et FIP) et l’autre pour les FCPR allégés est maintenu. Celles-ci traitent de la procédure d’agrément ou de déclaration des Fonds, des modifications apportées au Fonds en cours de vie et des modalités d’information des porteurs de parts.
Dernières Consultations & Operations –
Prochains Colloques
Dernières consultations et opérations :
- Extension du programme d'activité d'une société de gestion de portefeuille ;
- Consultation relative aux conditions d’éligibilité des investissements réalisés dans les DOM-TOM (devenus DROM-COM) au quota d’investissement des FIP ;
- Litige entre un porteur de parts de FCPR et une société de gestion,
- Audit/revue pour le compte d’un investisseur des statuts d’une SICAR,
- Audit/revue pour le compte d’un investisseur du règlement d’un FCPR,
- Mise en place d’une méthode de calcul des ratios d’un FCPR fiscal,
- Consultations sur les activités éligibles des holdings ISF ;
- Adaptation de Management Packages,
- Requête devant le Tribunal Administratif pour le compte d’une société de capital-risque ayant fait l’objet d’un redressement à la cotisation minimale de taxe professionnelle,
- Consultation sur le champ d’application de l’obligation de catégorisation des clients,
- Portée des réglements locaux de publicité complétant les règles applicables en matière de publicité et d'affichage
- Réorganisation juridique et fiscale d'un groupe de sociétés,
- Mise en œuvre d'un programme de rachat d'actions et d'un contrat de liquidité ;
- Adhésion et mise en œuvre des recommandations AFEP - MEDEF relatives aux rémunérations des dirigeants et mandataires sociaux ;
- Revue d'une Charte de Gouvernement d'Entreprise et mise en conformité ;
- Présentation de la comparaison entre la pratique contractuelle en droit français et en droit américain,
- Consultation sur la coopération judiciaire internationale, et analyse de conventions d'entraide judiciaire avec la France,
- Rédaction de contrats de courtage pour la mise en relation entre des vendeurs de sociétés et un acquéreur potentiel
- Analyse des clauses de responsabilité dans des contrats de joint venture internationaux.
Prochains colloques :