EDITO : Retour sur les péripéties du mois de juin
Le mois de juin 2009 sera t-il à marquer d'une pierre noire dans l'évolution de la règlementation applicable aux gestionnaires de Private Equity ? L'avenir nous le dira mais il est certain qu'il aura apporté son lot d'incertitudes.
Tout débute le 15 juin avec la publication de deux instructions AMF relatives aux prospectus des Fonds agréés et allégés. Bien que ces instructions n'entreront en vigueur que le 15 aout prochain et remplaceront, à cette date, les instructions COB du 6 juin 2000, les professionnels ont d'ores et déjà du s'adapter et, pour certains dans l'urgence. En effet, c'est traditionnellement dans le courant du mois de juillet que les gestionnaires de FCPI et FIP déposent leur dossier de demande d'agrément à l'AMF en vue d'une commercialisation à la rentrée. Mais les nouvelles instructions concernent plus largement tous les Fonds qui seront prochainement constitués ainsi que les Fonds existants au 15 juin dont la période de commercialisation sera encore ouverte au 15 juin 2010. Désormais, les prospectus (c'est-à-dire pour les Fonds allégés, le règlement et, pour les Fonds agréés, le règlement et la notice d'information) devront décrire la stratégie d'investissement du Fonds par classe d'actifs, que celle-ci soit ou non éligible aux quotas d'investissement. Les prospectus devront également être plus précis sur les risques liés à un investissement dans le Fonds, tels que le risque de perte en capital, le risque de non liquidité, de valorisation, etc. A cet effet, une rubrique "Profil de risque" est créée. Les gestionnaires devront aussi être plus transparents sur l'ensemble des frais et commissions en détaillant leur assiette et leur montant (ou pourcentage maximum). Enfin, une contradiction mérite d'être soulignée : alors que l'instruction relative aux FCPR agréés limite à 20% la part des produits et plus-values nettes qui reviennent à la société de gestion et son équipe, dans le même temps l'administration fait circuler un projet de décret relatif au régime fiscal du carried interest autorisant un pourcentage supérieur…
Le lendemain, soit le 16 juin 2009, l'amendement dit "Adnot", qui interdit aux holdings ISF de compter plus de 50 actionnaires et qui, en pratique, aboutit à mettre fin à la commercialisation des holdings par voie d' "offre au public", entrait en vigueur.
Le 29 juin, la proposition de loi "Arthuis" était adoptée au Sénat. Elle prévoit que les Fonds ("Fonds ISF" et "Fonds IR") disposeront (i) de 6 mois à compter de la fin de leur période de souscription[1], qui ne pourrait excéder 8 mois à compter de la date de constitution du Fonds, pour atteindre 50% de leurs ratios d'investissement et (ii) de 12 mois pour atteindre 100% de ces ratios. Par ailleurs, leurs frais et commissions seront plafonnés[2]. S'il s'agit aujourd'hui d'une simple proposition de loi dont l'examen est attendu en octobre prochain à l'Assemblée Nationale, les professionnels anticipent d'ores et déjà son adoption.
Enfin, le 30 juin marque l'entrée en vigueur du nouveau régime fiscal[3] applicable au carried interest mais sans que ni le décret et ses taux dérogatoires d'investissement, ni l'instruction fiscale commentant le nouveau régime, ne soient publiés. Les professionnels se voient donc contraints d'investir 1% du montant total des souscriptions en parts ou actions de carried s'ils veulent bénéficier du régime des cessions de valeurs mobilières. A défaut, les distributions et les gains nets afférents à ces parts ou actions seront imposés à l’impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires. Et, comme l'indique Gilles Carrez, rapporteur général du budget, dans son rapport du 2 juillet sur l’application des mesures fiscales contenues dans les lois de finances et dans la loi TEPA, "il appartiendra à la direction de la sécurité sociale de confirmer ou d’infirmer le non assujettissement aux charges sociales des sommes imposées suivant les règles applicables aux traitements et salaires".
Espérons que la rentrée prochaine soit plus sereine…
Veille Juridique & Fiscale
Actualité Juridique
Proposition de loi tendant à favoriser l’accès au crédit des PME et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers
Une proposition de loi tendant à favoriser l’accès au crédit des PME et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers a été adoptée à l'Assemblée Nationale. Celle-ci met à la charge des banques l'obligation de notifier par écrit et par avance la diminution ou l'interruption de facilités accordées, de communiquer leur notation aux PME qui sollicitent un crédit et de rendre publics les montants des financements accordés aux PME créées dans l'année et aux entreprises de moins de trois ans. Elle prévoit également, sous l'égide d'Oséo, la création d'un prêt spécifique pour les jeunes entreprises de 2 à 5 ans, cautionné par l'État, d'un montant maximum de 50.000 euros.
Elle devrait permettre également aux sociétés cotées sur Euronext de se transférer sur des marchés non règlementés (marchés organisés et SMN). Enfin, la proposition de loi ratifie les ordonnances relatives aux SICAF, aux fonds fermés étrangers et à certains instruments financiers, à la gestion d’actifs pour compte de tiers, aux rachats d’actions, aux déclarations de franchissement de seuils et déclarations d’intentions.
Rémunérations des dirigeants mandataires sociaux et des opérateurs de marchés
Un rapport d'information présenté le 7 juillet 2009 par M. le Député Philippe Houillon préconise la mise en œuvre de 16 mesures destinées à encadrer la rémunération des dirigeants mandataires sociaux. Ainsi :
- le montant des rémunérations et avantages de toutes natures consentis annuellement aux dirigeants mandataires sociaux déductibles de l’IS serait plafonné à 1 million d’euros,
- les conseils d’administration ou de surveillance devraient consulter les assemblées générales ordinaires des actionnaires sur l’intégralité des éléments de rémunération et les engagements de toutes natures correspondant à des indemnités ou à des avantages dus ou susceptibles d’être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement de fonctions d’un dirigeant mandataire social,
- le nombre de mandats sociaux pouvant être simultanément détenus par une même personne physique au sein de sociétés anonymes ayant leur siège social en France serait limité à 3, dès lors qu’au moins l’une de ces sociétés présente un chiffre d’affaires hors taxe, un total de bilan et un nombre moyen de salariés excédant les seuils fixés par l’article R. 233-16 du code de commerce,
- le cumul entre mandat social et contrat de travail serait interdit afin d’empêcher tout cumul d’indemnités de départ,
- aucun jeton de présence ne pourrait être attribué aux présidents de conseil d’administration ou de surveillance et aux directeurs généraux et généraux délégués lorsqu’ils sont administrateurs de la société qu’ils gèrent.
L'administration Obama souhaite mieux réguler l'activité des traders, brokers et conseillers en investissement
Pendant la 1ère quinzaine de juillet, l'administration Obama a présenté deux projets de loi visant à encadrer davantage l'activité d'intermédiaire financier. Le premier vise à exiger que lorsque les brokers, traders et conseillers en investissements fournissent un conseil en investissement, ils agissent exclusivement dans l'intérêt de leurs clients. Surtout, le projet donne plus de pouvoirs à la SEC. Celle-ci pourrait interdire certains mécanismes de rémunération des intermédiaires financiers qui les poussent à proposer des produits financiers non adaptés à leur clientèle. Ce projet pourrait entrainer une modification profonde des systèmes de rémunération des intermédiaires financiers en charge de la commercialisation des Fonds. La SEC pourrait également interdire à une personne ayant commis une infraction financière dans le cadre de son activité professionnelle d'exercer à nouveau une activité financière, que celle-ci soit ou non en relation avec l'infraction commise. Le second projet de loi tend à rendre obligatoire l'enregistrement des gérants basés aux États-Unis ou des personnes, quelque soit leur lieu d'établissement, conseillant des Fonds US (Hedge et Private Equity funds).
De son coté, la France ferait pression sur la Commission européenne pour que celle-ci aille plus loin dans son projet de directive relatif aux exigences en fonds propres des banques. La France souhaiterait que le volet dédié aux rémunérations des professions bancaires et notamment des traders soit complété pour permettre aux autorités de sanctionner le non respect des principes posés par le Forum de stabilité financière (équilibre entre salaires et bonus, paiement des bonus en partie différé dans le temps, etc.).
Réforme de la valorisation des instruments financiers
L'IASB (International Accounting Standards Board) propose de revoir le principe de comptabilisation des instruments financiers à la "fair value". Selon le projet soumis à consultation jusqu'au 14 septembre prochain, les méthodes de valorisation des instruments financiers seraient ramenées d'une vingtaine à deux seulement : soit les instruments seraient valorisés à leur coût amortissable (lorsqu'ils présentent les caractéristiques d'un emprunt et qu'un rendement a été contractuellement arrêté), soit ils resteraient valorisés à la fair value c'est-à-dire à leur valeur de marché.
Publication de la liste des marchés européens réglementés
Cette liste a été publiée au JO de l'Union européenne du 11 juillet dernier. Il s'agit pour la France d'Euronext Paris, du MONEP et du MATIF.
Vers un code de bonne conduite des agents placeurs?
L'EVCA (European private equity and Venture Capital Association) a rédigé un code applicable à l'activité de placeur, en complément de son code de bonne conduite, qui devrait être définitivement adopté et publié avant la fin de l'année.
Établissement du rapport spécifique 2009 sur l'incidence, sur les fonctions de RCSI et RCCI, des perturbations que connaissent les marchés depuis 2007
Les RCSI et RCCI doivent adresser à l'AMF avant le 30 septembre 2009 leur rapport spécifique. Cette année le rapport doit expliquer de quelle façon les fonctions de RCSI et RCCI ont été affectées par les perturbations que connaissent les marchés depuis 2007.
Actualité fiscale
Taxe professionnelle : mise en œuvre d'un impôt progressif assis sur la valeur ajoutée?
En contrepartie de la suppression de la taxe professionnelle sur les biens d'équipements et mobiliers, l'État devrait désormais imposer les entreprises au titre de leur valeur ajoutée dès que leur chiffre d'affaires atteint 500.000 euros contre 7.6 millions aujourd'hui. Le taux serait progressif ; débutant à 0.50% pour un CA de 3 M€ et atteignant jusqu'à 1.5% pour un CA de 50 M€.
Si cette réforme s'avère globalement favorable à certains secteurs tels que l'industrie, il est évident que nombre d'entreprises (notamment du secteur financier) devraient être perdantes.
Ainsi, si aujourd'hui ce sont seulement certaines sociétés de capital-risque, réalisant des plus-values pour un montant d'au moins 7.6 M€, qui se voient réclamer le paiement de la cotisation minimale de taxe professionnelle, il est clair que demain, si ce projet de loi devait trouver application, ce serait toute société (et non plus seulement certaines SCR) qui se verrait taxée et cela dès qu'elle réalise pour au moins 500.000 euros de plus-values.
Réduction d'ISF pour investissement dans des PME
Un projet d'instruction fiscale commentant l'amendement dit "Adnot" relatif aux holdings ISF et le relèvement des aides d'état est en cours de consultation.
Décret du 30 juin 2009 pris en application des articles 223 E et 223 L du CGI
Il précise les conséquences fiscales de la sortie d'une société d'un groupe intégré lorsque celle-ci a lieu dans les dix-huit mois de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ou à la suite de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire.
Dernières instructions fiscales:
- 5 G-5-09 n° 70 du 16 juillet 2009 : Impôt sur le revenu. Bénéfices non commerciaux. Produits de la propriété industrielle. Apport des éléments de la propriété industrielle à une société. Aménagement du régime de report de la plus value d'apport prévu au I ter de l'article 93 quater du CGI. Article 14 de la loi de finances pour 2008.
- 4 A-11-09 n° 68 du 13 juillet 2009 : Crédit d'impôt en faveur de l'intéressement
- 7 G-6-09 n° 66 du 2 juillet 2009 : Mutations à titre gratuit. Exonérations et régimes spéciaux. Exonérations motivées par la qualité du bénéficiaire. Exonération des dons et legs consentis aux fonds de dotation. Commentaires du II de l'article 141 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie.
Derniers rescrits :
- RES N°2009/38 (FE) Application du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation prévu à l'article 212 du CGI : "Quelles sont les modalités d'application de la tolérance prévue au n° 56 de l'instruction administrative 4 H-8-07 permettant de substituer le capital social aux capitaux propres pour le calcul du ratio prévu au a du 1 du II de l'article 212 du code général des impôts ?"
- RES N°2009/40 (FP) Réduction d'impôt sur le revenu au titre de la souscription en numéraire au capital de sociétés non cotées. Modalités d'appréciation de la qualité de petite et moyenne entreprise (PME) au sens de la réglementation communautaire, lorsque la société bénéficiaire des souscriptions est une société nouvellement créée et dont les comptes n'ont pas encore été clôturés. "Pour l'application de la réduction d'impôt sur le revenu pour souscription en numéraire au capital de petites et moyennes entreprises (PME), prévue aux I à V de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts (CGI), à quelle date doit-on apprécier la condition tenant à la qualité de PME, au sens de la réglementation communautaire, de la société bénéficiaire des souscriptions lorsque celle-ci est nouvellement créée et que ses comptes n'ont pas encore été clôturés ?"
Actualité AMF
OPCI
L'AMF a publié une nouvelle instruction relative au prospectus complet des OPCI agréés.
Certification professionnelle des acteurs de marché
A compter du 1er juillet 2010, le dispositif de vérification des connaissances professionnelles par les prestataires de services d’investissement (PSI) entrera en vigueur. Mais c'est dès octobre prochain que les demandes de certification d’examens seront étudiées par le Haut Conseil certificateur de place afin d’être validées par l’AMF.
D'une manière générale, toutes les personnes physiques placées sous l'autorité du PSI ou agissant pour son compte doivent disposer des qualifications et de l’expertise appropriées ainsi que d’un niveau de connaissances suffisant. Mais désormais, la mise en œuvre de ce principe devra être vérifiée. En effet, le PSI devra s'assurer que les personnes exerçant certaines fonctions-clés (gérant de société de gestion de portefeuille, analyste financier, RCCI…) disposent des compétences nécessaires. Pour cela, le PSI pourra soit procéder à une évaluation en interne selon une procédure formalisée qui pourra être contrôlée a posteriori par l’AMF, soit faire passer à ces personnes un examen externe certifié. Néanmoins, en vertu de la clause de grand-père, les personnes-clés qui sont en exercice au 1/07/2010 ne devraient pas être soumises à cette procédure, sauf à ce qu'elles changent d’entreprise après cette date.
Rapport de l’AMF sur les rémunérations des dirigeants des sociétés cotées
Le rapport de l'AMF sur la mise en œuvre des recommandations AFEP-MEDEF est disponible sur son site internet.
Dernières Consultations & Operations –
Prochains Colloques
Dernières consultations et opérations :
- rédaction d'une opinion juridique dans le cadre de la garantie donnée par une société mère française pour couvrir les obligations contractées par l'une de ses filiales américaines dans un bail commercial,
- transaction et résolution à l'amiable d'un litige concernant l'occupation de locaux par un locataire au-delà de la date d'expiration d'un bail commercial,
- rédaction de règlements et de notices d'information de FCPI et FIP conformes à la nouvelle instruction;
- analyse de l'éligibilité de sociétés innovantes aux ratios de FCPI;
- consultation sur les différents mécanismes pouvant être mis en place au sein d'une start-up pour intéresser et fidéliser ses cadres (intéressement de projet, participation, BSPCE, carried interest, attributions gratuites d'actions, etc.)
- consultation sur les modalités de commercialisation d'entités d'investissement étrangères (placement privé, démarchage, conseil en investissement, etc.)
- audit de ratios de Fonds.
Prochains colloques :
Publications :
- Les Fonds de Capital Investissement, Principes Juridiques et Fiscaux, 2è édition, Daniel Schmidt et Florence Moulin (Cabinet Proskauer Rose), Préface de M. Hervé Novelli, Gualino Editeur. En vente notamment à l'AFIC.
- Guide de l’investissement ISF dans les PME, publié par Les Échos-Capital Finances, avec la collaboration de Daniel Schmidt et Florence Moulin (Cabinet Proskauer Rose).
- Le Guide des négociations commerciales 2009-2010, Mireille Dany (Cabinet Proskauer Rose), Régis Fabre et Léna Sersiron (Cabinet Baker & McKenzie), aux Éditions Dalloz
[1] Ou pour les fonds déjà existants, 6 mois à compter de la promulgation de la loi.
[2] À un montant qui sera fixé par le Ministre de l'Économie!
[3] Les nouvelles règles "s’appliquent aux fonds communs de placement à risques créés à compter de la date de publication du décret mentionné au b du 3° et au b du 5° du I e t au plus tard le 30 juin 2009 et, pour les sociétés de capital risque et les entités, aux actions et droits émis à compter de la même date".